Ratio de patients par soignant : quitte ou double?
Le principe d'un ratio patients/soignants fait son chemin. La réponse donnée à ce dispositif donnera d'abord une idée de la volonté politique d'amorcer la sortie de crise de l'hôpital.
Non, la promesse d’Aurélien Rousseau de rouvrir plusieurs milliers de lits d’hospitalisation d’ici la fin 2023 n’a pas été tenue. A moins d’user d’un artifice désormais classique et très comptable (et encore….) : celui de contrebalancer les fermetures de lits d’hospitalisation complète (avec nuitée), 4.867 lits de moins en 2023 qu’en 2022 d’après la DREES, avec ceux de l’hospitalisation partielle (l’ambulatoire), 3.489 places en plus…
En revanche ce que l’on voit bien, c’est que la dernière assertion de l’ex et éphémère ministre de la santé quant à la hausse et une “dynamique” des recrutements – qui pour l’heure se mesure surtout à une baisse certes moins marquée du nombre de lits, mais une baisse quand même 1 – ne relève pas du hasard.
D’abord, parce que se profile le projet de loi de financement de la Sécurité sociale et avec lui un nouveau serrage de vis budgétaire des hôpitaux. De fait, l’augmentation des dépenses de santé devrait être limitée à + 3 % 2. Quand la Fédération hospitalière de France estime qu’il faudrait a minima 6%.
Ensuite parce que se dessine aussi l’examen d’un texte que la profession, et notamment les infirmiers dont la pénurie est devenue aussi criante que chronique, attend depuis plusieurs mois : celui qui gravera dans la loi la mise en place d’un ratio patients/soignant. L’idée d’un nombre maximum de patients par soignants – qui existe déjà pour certaines spécialités comme en réanimation ou en soins intensifs – n’est pas nouvelle. Elle avait d’ailleurs été une des préconisations de la commission d’enquête sur l’hôpital public.
C’était il y a trois ans. Depuis, une proposition de loi a germé, initiée par les socialistes et votée de manière transpartisane par le Sénat. C’était en février 2023 – bientôt deux ans – sans que le texte ne trouve jusque-là une place dans le calendrier de l’assemblée nationale pour y être examiné dans le cadre de la navette parlementaire.
Lassés d’attendre, ses promoteurs entendent profiter de la semaine d’initiative parlementaire, début décembre, pour pousser à ce qu’un groupe se saisisse du texte. A défaut, le groupe socialiste s’y attèlera le 12 décembre, lors de sa session.
Reste à voir ce qu’il en restera. D’abord parce que Renaissance a clairement fait comprendre que la proposition de loi ne l’emballait pas. On se rappelle que le gouvernement, par la voix de sa ministre chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo avait jugé l’objectif du texte “légitime” mais son adoption “contreproductive”.
Pour la ministre, non seulement les ratios ne règleraient rien mais risqueraient d’aggraver la situation. Via notamment des fermetures de lits, voire des fermetures de services si les ratios ne seraient pas respectés, le personnel n’étant tout simplement pas là. Un discours que ne renieraient pas les directeurs d’établissements qui s’étaient inquiétés des difficultés d’application à venir si, qui plus est, la mesure n’était pas suffisamment financée en attendant de potentielles économies qui ne seront pas instantanées.
Pour la profession, l’argument du manque de personnel ne tient pas.