[ Edito ] Ukraine et Moldavie, la grande débandade
L'Ukraine s'effondre. En Moldavie, le référendum a tout l'air d'avoir été bidouillé. Tout va bien.
Les “services sud-coréens” auraient fait fuiter à la presse un dossier bien documenté montrant que 1 500 membres des forces spéciales nord-coréennes auraient été envoyées en Russie et seraient en passe de participer aux combats dans la région de Koursk. Il est également affirmé que 12 000 soldats nord-coréens seraient en route vers la Russie. Et les méchants nord-Coréens auraient encore livré des armes à Moscou, ce qui est un scandale interplanétaire alors que l’Occident a alloué plus de 300 milliards de dollars d’aide militaire à l’Ukraine depuis le début du conflit. Le commerce d’armes d’Etat à Etat n’est pas illégal, y compris en temps de guerre.
Cela fait beaucoup de conditionnels, ne trouvez-vous pas ?
Cette fuite est intervenue la semaine où, pour la première fois, la Corée du Sud, le Japon, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont participé à un sommet de l’Otan. Le Pacifique se trouve désormais en Atlantique Nord... Ne discutez pas, c’est quantique.
La même semaine, le G7 se réunissait en “format défense”, une absurdité qui n’a jamais existé. Rappelons que le G7 est un club tellement informel qu’il ne dispose même pas de secrétariat. Les sept pays le composant n’ont plus rien de “grands” tant en terme de part de PIB mondial que de part de la population mondiale.
En résumé, on nous prend encore pour des perdreaux de l’année. Ceux qui sont aux manettes gouvernent une nouvelle fois par la crise, crise qu’ils ont créée de toutes pièces afin de se poser comme seuls à même de la résoudre. Cela vaut pour l’ensemble des dirigeants des pays de l’UE, des institutions européennes et des bureaucraties qui vont avec.
Encore une opération psychologique qui a pour cible les opinions occidentales afin de leur faire gober que les USA, l’Otan, l’UE et l’Ukraine n’ont pas lamentablement perdu cette guerre inutile, qui a causé des centaines de milliers de morts pour rien et que le “pognon” de dingue spolié aux contribuables occidentaux ne l’a pas été en pure perte ni détourné pour garnir les comptes en banque off-shore des dirigeants ukrainiens. Les dirigeants occidentaux ne sauraient être tenus responsables de rien. Parce que rien ne doit changer. Et parce que si Poutine a gagné, c’est grâce au soutien de l’axe du mal Pékin - Pyongyang - Téhéran.
Le tout alors que Volodymyr Zelensky a réitéré sa menace du 19 février 2022 : soit l’Ukraine rentre dans l’Otan, soit l’Ukraine acquiert l’arme nucléaire. En clair : soit la guerre avec la Russie, soit la guerre avec la Russie. Une fois de plus, il essaie de forcer les pays de l’Otan à intervenir directement. Et est repris en cœur par tout ce que compte l’Europe d’inaptes laquais, politiques comme médiatiques. Prenez par exemple le bichon à poil ras de Catalogne, qui grogne sur le plateau de LCI.
Le tout alors que va s’ouvrir le sommet des Brics à Kazan, rassemblant plus d’une vingtaine de pays représentant à eux seuls près de 50 % de la population de la planète. Un groupe aujourd’hui bien plus puissant à tous points de vue que le G7.
Le tout à trois semaines de l’élection présidentielle américaine lors de laquelle Donald Trump remportera vraisemblablement à la fois le Collège électoral et le vote populaire.
Ultime soubresaut des néoconservateurs qui mettent la planète à feu et à sang depuis trente-cinq ans ? Viendraient-ils de prendre conscience qu’ils risquent d’être définitivement écartés du pouvoir et que certains parmi eux, civils comme militaires, seront poursuivis et finiront derrière les barreaux ? La purge va être sévère. Elle ne manquera pas non plus de survenir en Europe par contrecoup.
Certains ont déjà amorcé le rétropédalage - à moins bien sûr qu’ils aient toujours su.
La mondialisation et le néolibéralisme, c’est fini. C’est le système issu de la guerre froide qui, enfin, est en train de désagréger. La multipolarité est l’état normal du monde. La bipolarité puis l’hégémonie américaine ne furent que deux anomalies passagères.
Cette manipulation à propos des troupes sud-coréennes porte la marque de la “diplomatie publique” de l’Otan. La ficelle est grosse, très grosse. Pour pouvoir arguer d’une menace qui n’existe pas – ni la Russie ni la Corée du Nord n’ont d’intentions belliqueuses vis-à-vis de l’Europe. Afin de justifier l’existence de l’Otan qui ne se justifie plus depuis trente-cinq ans, sauf pour vendre aux Européens des armes américaines. Afin de persister à dissimuler que depuis 1990, l’Otan est devenue une alliance agressive qui dessert les intérêts de l’ensemble de ses membres européens, contrairement à la nature purement défensive que lui confère le traité de l’Atlantique Nord.
Admettons que la Corée du Nord ait bien envoyé 1 500 soldats et que 12 000 suivent. Cela n’aura aucun impact sur le cours de la guerre. L’Ukraine n’aura bientôt plus un homme valide pour tirer un coup de fusil et ce ne seront pas les quelques misérables brigades formées en Europe qui renverseront la vapeur.
Ah non! On nous dit dans l’oreillette qu’on n’a pas la moindre idée de la présence de troupes nord-coréennes en Russie mais qu’on est en train de se renseigner, restez en ligne s’il vous plaît. Les Nord-Coréens, la nouvelle version de la fiole de Colin Powell à l’Onu et des armes de destruction massives de Saddam Hussein en 2003 ?
La Russie n’a besoin de personne pour mener et gagner cette guerre, si ce n’est pour éventuellement sécuriser sa frontière avec l’Ukraine, où d’éventuelles troupes nord-coréennes viendraient (encore un conditionnel) en renfort des troupes tchétchènes, afin que des péripéties comme celle de Koursk ne se reproduisent pas. Tenez, comme le font les Etats-Unis en Corée du Sud depuis 1953, en sécurisant militairement la zone démilitarisée…
Moscou envoie également un signal à l’Occident : n’avez-vous pas assez de l’escalade horizontale au proche Orient où les porte-avions de l’Otan ont été chassés de la Mer rouge et sa flotte de guerre est tenue en échec par les Houthis depuis un an ? Voulez-vous un nouveau front de grosse tension en Asie alors que vos arsenaux sont vides et vos capacités militaires tendues jusqu’à leur point de rupture ?
Et pendant ce temps-là, le ministre des affaires étrangère Jean-Noël Barrot, digne fils de son père, agite la peur que la chute de l’Ukraine conduira à l’explosion des prix de l’énergie et des céréales et sera néfaste pour le quotidien des Français.
L’Ukraine est déjà tombée et on a déjà vu les répercussions sur le prix de l’énergie et des céréales, qui a rapidement augmenté en 2022 puis est tout aussi rapidement retombé. Le prix des céréales est un prix de marché mondial. Celui du gaz aussi. A moins de passer des contrats de long terme avec la Russie, interdits en Europe. La France ne s’approvisionne de toute façon ni en gaz via l’Ukraine, et elle est un exportateur de net de céréales.
Ne s’arrêtant pas là, affublé d’un gilet pare-balles comme Bernard Kouchner en son temps d’un sac de riz, Jean-Noël Barrot exige que la Russie change … de grammaire et de langage. Il faudrait lui expliquer ce qu’est la guerre : une grammaire, un langage par lequel, en usant de la force, on impose sa volonté politique à son adversaire.
Qui a décidé de milliers de sanctions, du gel des avoirs de la banque centrale russe et la spoliation de leurs intérêts pour financer l’effort de guerre ukrainien sous la forme d’achat d’armes, de munitions et matériel occidentaux dans un conflit qui n’est pas la nôtre? Qui donc a un besoin d’urgent de séances d’orthophonie diplomatique ?
C’est la panique à tous les étages. Les Moldaves de Moldavie, qui ne sont pas des Moldus, viennent de dire non à l’EU malgré son plan d’investissement de 1,8 milliards d’euros annoncé une semaine avant le référendum, histoire d’acheter leur adhésion. La présidente Sandu hurle aux ingérences étrangères, et notamment russes, alors que, jouant sa réélection, elle est arrivée en tête au premier tour de la présidentielle le même jour, “preuve” qu’il n’y en a pas eu.
La Russie se contrefiche de l’entrée de la Moldavie dans l’UE - la Russie a en fait tout à y gagner - mais la composition de son gouvernement et la personne de sa présidente l’intéressent au plus au point, à cause de l’Otan.
Pour Les Echos, le résultat de ce référendum ne remet pas en cause le processus d’adhésion de la Moldavie à l’Ukraine. Rappelons qu’un référendum consiste à demander au peuple, seul souverain, de trancher directement et de manière définitive. La présidente moldave n’a d’autre choix que de mettre un terme séance tenante au processus d’adhésion comme le fit la Norvège après que son peuple se fut prononcé majoritairement contre l’UE lors du référendum de 1994. A moins que l’on fasse aux Moldaves ce qu’on a fait aux Français avec le traité de Lisbonne suite au référendum sur le Traité constitutionnel européen en 2005. Ce sera alors la démonstration que l’UE est par essence antidémocratique.
Ah mais non ! On nous dit dans l’oreillette que finalement c’est le “oui” qui l’emporte alors qu’à 00 h30, le “non” était majoritaire à 54% avec 91% des suffrages dépouillés. La présidente moldave elle-même s’était résignée! Cela rappelle furieusement l’élection présidentielle américaine de 2020 où Trump menait devant Biden à la même heure. Jusqu’à ce qu’au réveil, ben non, Biden avait gagné... Le référendum est le scrutin le plus rapide à dépouiller. Deux heures après la fermeture des bureaux de vote, c’est réglé. Pourquoi donc donc la Moldavie a-t-elle eu besoin d’une nuit ? L’explication donnée est le vote des Moldaves de l’étranger dont le dépouillement invérifiable a été effectué à notre connaissance sans scrutation.
Cela ressemble furieusement à du trucage du référendum, ultime dépossession de la souveraineté d’un peuple, puisqu’il est statistiquement impossible qu’un tel retournement se soit produit en l’espace d’une nuit. Voudrait-on plonger la Moldavie dans un très grave conflit civil qu’on ne s’y serait pas pris autrement. Qu’y a-t-il de pire que le résultat d’un référendum auquel personne ne croit, y compris ceux en faveur de l’entrée de la Moldavie dans l’UE ?
Prenons la mesure de ce qui vient d’être fait : l’Union européenne, succursale de l’Otan et de Washington, vient de se mettre une balle dans la tête en croyant tuer la démocratie pour se sauver elle-même. Jacob Siegel ne se trompe pas quand il écrit : “cette stratégie vise à préserver le rituel du vote, tout en limitant son influence."
En Géorgie, tous ceux, minoritaires, qui sont stipendiés par les USA et l’EU sont dans la rue, pétris d’une sainte terreur à l’idée que leur gouvernement de centre-gauche, qui n’est pas en faveur de l’adhésion à l’UE, eusse raison. La présidente géorgienne, la française Salomé Zourabichvili (qui n’acquis la nationalité géorgienne que lorsqu’elle était ambassadeur de France en Géorgie en 2004, après la révolution des Roses), vient vraisemblablement de comprendre que la messe était également dite pour la Géorgie - et pour sa carrière politique.
Ah non ! On nous dit dans l’oreillette que la manipulation, l’opération psychologique sur le même modèle que les révolutions de couleur se poursuit. C’est l’évidence, tous les habitants de Tbilissi possèdent des drapeaux européens chez eux et des banderoles rédigées en anglais…
L’Arménie, elle, demandera à Kazan le statut d’observateur aux Brics.
Il faudrait être fou pour rejoindre aujourd’hui un château de cartes qui s’effondre. Il va falloir se faire une raison : l’UE ne fait plus rêver. L’a t-elle jamais fait?
Sic transit gloria Mundi.
Une analyse des plus pertinentes. Merci de tous vos billets !