[ FLASH ] Fête des tuiles : Guy Tuscher, ancien élu de la municipalité d'Eric Piolle, témoigne
Guy Tuscher a été conseiller municipal dans la majorité d'Eric Piolle de 2014 à 2016. Il témoigne de ce qu'il a vu et entendu. Pas vraiment la version donnée aux juges par le maire de Grenoble.
En écho à notre article publié ce 23 juin traitant du procès en appel dans l’affaire des marchés de la Fête des tuiles, Guy Tuscher, ancien élu de la majorité d’Eric Piolle dont il fut exclu en 2016 pour s’être abstenu de voter le budget municipal qui prévoyait notamment la fermeture de bibliothèques dans les quartiers populaires, a fait parvenir une lettre à la presse. Une lettre dans laquelle il relate ce qu’il a vu, ce qu’il a vécu durant la campagne d’Eric Piolle et lors de l’attribution des marchés de la Fête de tuiles. Guy Tusher a également présidé la commission d’appel d’offres (CAO) de la ville de Grenoble.
Nous publions cette lettre.
Ce témoignage vient corroborer ce que nous relations dans ce podcast , qui nous avait valu un procès en diffamation de la part d’Eric Piolle, qu’il avait perdu.
Eric Piolle devant la cour d'appel
Je n'avais aucunement l'intention d'assister au procès en appel d' Eric Piolle dans l'affaire du marché de la Fête des tuiles, cependant un compte rendu des déclarations du maire lu dans la presse (Dauphiné Libéré du 19 juin, premier jour du procès) m'a profondément énervé puisque je ne trouvais pas le sommeil la nuit suivante. A 5 heures du matin, je prenais la décision d'assister à la séance du jour et de demander à la présidente de pouvoir apporter un témoignage oral pour l'établissement des faits et de la vérité. Je précise que je ne sais même pas si cette procédure est possible.
Pendant l'audience du 20 juin, à la reprise de 15 heures et avant les plaidoiries, je lève donc la main et demande à madame le Président de la cour d'appel de témoigner à l'oral. Elle m'oppose un refus, conformément à sa fonction.
J'écoute avec grand intérêt la plaidoirie de madame l'avocat général et j'approuve son analyse des responsabilités établies.
Cependant, je ne suis pas totalement en accord avec sa conclusion quant à Eric Piolle puisqu'elle semble lui accorder le bénéfice du doute sur sa connaissance de la problématique juridique du marché. En effet, je suis obligé de considérer pour ma part que les phrases suivantes qu'il a prononcées la veille n'ont aucune crédibilité : « je n'ai pas été alerté » ... « J’ai participé à deux moments s’agissant de ces deux éditions de la Fête des Tuiles. J’ai donné mon avis sur sa localisation et j’ai pris une décision en faveur d’un défilé. J’ai appris le reste dans ce dossier. Je suis parfaitement à l’aise »...
Voici l'explication, elle réside dans le fonctionnement interne du groupe majoritaire à l'époque.
En effet ce groupe, en totalité de ses 42 membres, se réunissait en présence du maire, une fois par semaine en règle générale (tous les lundis) et un représentant de chaque courant politique de la majorité y était également invité. L'ordre du jour était proposé par le bureau du groupe. Tout élu ou représentant des mouvements pouvait également demander à aborder un autre point souvent lié à l'actualité.
La question de la Fête des tuiles a été abordée à plusieurs reprises avec, entre autres, le questionnement sur la procédure choisie et l'alerte donnée par le service juridique. La décision de cette manifestation revêtait un caractère éminemment politique et prioritaire puisqu'il s'agissait d'en faire un événement de très grande portée identifiable à la ville de Grenoble (et donc à sa nouvelle majorité municipale), telle la grande braderie de Lille ou encore le marché de Noël de Strasbourg, pas moins, cités en exemple...
L'exécutif dont Olivier Bertrand (alors élu en charge de l’animation, ndlr), le directeur général des services souvent présent et le maire en tête nous ont rassurés en affirmant que la procédure était régulière puisqu'il s'agissait d'une prestation artistique... aucun élu n'étant juriste (à part maître Coutaz) nous leur avons fait confiance.
La soi-disant non connaissance du dossier par le maire de Grenoble avant les procès est donc une sorte de « légende » qui apparaît fabriquée pour la circonstance et pour sa défense et que l'on pourrait résumer par : un maire trop occupé par ailleurs pour s'occuper de « petits détails » juridiques.
Dès lors je ne saisis pas bien les larmes versées puisque le maire a maintes fois annoncé que le dossier n'était que technique. La loi étant sujette à interprétation divergente d'après lui, pas de quoi fouetter un chat en quelque sorte... Je ne vois qu'une explication : le regret d'avoir mis dans la difficulté et finalement en accusation devant un tribunal ses services par une pression politique... dans ce cas, des larmes ne suffisent pas il faut d'abord s'excuser puis accepter d'endosser sa responsabilité pleine et entière !
S'agissant de la déclaration du maire de ne pas connaître Pascal Auclair, tout dépend de ce que l'on appelle connaître. J'explique : j'ai été convoqué pour un entretien individuel avec le maire tout nouvellement élu afin de parler attribution de délégation (chaque élu-e aurait été ainsi individuellement reçu-e). Enzo Lesourt (le conseiller spécial du maire à l’époque, qui a a claqué la porte depuis, ndlr) me donne le rendez-vous à l'appartement de l'association Fusées rue Abbé Gregoire et m'en donne le code d'accès. Je suis surpris que la personne qui m'ouvre soit Pascal Auclair (que j'ai connu pendant la campagne. J'ai épluché 10 kg de légumes à mon domicile pour la disco-soupe du marché Saint Bruno) et je m’aperçois qu'a lieu une réunion de membres de la nouvelle majorité avec Piolle. On me dit que je ne peux pas y assister et je suis prié de me mettre dans une chambre (dont la porte sera refermée) afin d'attendre qu'Eric (Piolle, ndlr) m'y rejoigne (au bout de 20 minutes)... Pascal Auclair, lui semble bien présent à la réunion !
Cependant, je comprends (et approuve) le réquisitoire de l'avocat général qui demande de ne pas condamner l'association Fusées et ses dirigeants qui n'ont pas de service juridique contrairement à une collectivité de 4 000 agents.
Ce procès en appel va-t-il se conclure comme le film américain de John Ford “L'homme qui tua Liberty Valance” : « On est dans l'Ouest, ici. Quand la légende dépasse la réalité, alors on publie la légende ! » ?
Guy Tuscher
Précisions : à l'époque des deux premières Fêtes des tuiles je suis un élu de la majorité sans délégation. Il m'est cependant demandé de présider la CAO (commission d'appel d'offre) et la procédure MAPA (marchés publics à procédure adaptée) les jours où l'adjoint Jacques Viard, président habituel (un arrêté du maire est pris pour chaque cession) est indisponible. Je n'ai pas vraiment connaissance des procédures. Aussi, Mme Corbineau, chef du service juridique, sympathique, compétente, excellente pédagogue et pourtant surchargée de travail mais voulant s'assurer qu'un élu à cette fonction soit bien au courant m'assure une formation accélérée et je présiderai donc la commission.
Je ne le ferai cependant qu'à trois reprises. Je décline en effet les nouvelles demandes du groupe car en relisant le CGCT (code général des collectivités territoriales) je m’aperçois qu'il n'est réglementaire que cela soit un élu en 38e position protocolaire qui doive assurer cette fonction que si et seulement si, le maire puis, de la 1ère adjointe jusqu'à moi, tous ces adjoints et élus se soient déclarés indisponibles. Et je n'avais aucune preuve de ces indisponibilités (bien au contraire !). J'en informe la vice-présidente du groupe Laurence Comparat qui n'y voit, elle, aucun problème … on ne se bousculait pas au portillon de présidence de la CAO.