
[ SMS Gate ] Plainte du New York Times : la leçon américaine
Les poursuites du quotidien contre la Commission européenne en disent autant de la corruption des institutions que du fonctionnement de notre démocratie. Mme Von der Leyen sera entendue en huis clos.

Dans le journalisme, on a coutume de dire que pas de réponse est une réponse. De la même manière, ce que ne publient pas les médias en dit tout autant, notamment du fonctionnement de nos démocraties et de la représentation et de l’écho donné à la pluralité des expressions, que ce qui remplit les colonnes des journaux.
Prenez le narratif de la guerre en Ukraine dans les mass médias et cherchez, si ce n’est le point de vue russe, une source russe… Vous ne trouverez pas. Ou de manière très exceptionnelle.
De la même manière, comme nous le relations le 10 février, on ne trouve rien dans les gros titres au sujet des Twitter Files. L’on n’a pas non plus trouvé grand-chose des révélations de Seymour Hersch quant au sabotage de Nordstream attribué aux Américains, si ce n’est un quasi-lynchage du journaliste américain, histoire de tenter de faire diversion. Un peu comme le coup des ballons.
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On ne s’étonnera donc pas du peu de retentissement du nouvel épisode de l’affaire des SMS échangés – et officiellement disparus – entre Ursula Von der Leyen et Albert Bourla en marge des négociations d’un contrat de 1,8 milliard de doses de vaccins contre le Covid-19.
Rappelons en préambule que la présidente de la Commission européenne avait échangé en direct avec le PDG de Pfizer, seule, au nez et à la barbe de l’équipe de négociation ad-hoc. Qu’il s’agit du plus gros contrat. Que les prix des vaccins, ont été augmentés en 2021 (de 12 à 19,50 euros la dose), et pourraient encore être rehaussés comme l’a révélé le 27 janvier dernier Reuters dans une dépêche passée complètement sous les radars de la presse, Pfizer négociant une hausse des prix en échange d’une baisse des volumes fournis, l’Europe ne parvenant pas à écouler ses stocks…
On rappellera que les eurodéputés, membres de la commission spéciale Covid, n’ont jamais pu entendre Albert Bourla, tout aussi introuvable que les textos. Lequel posait deux jours après aux côtés de la commissaire européenne à la Santé, la chypriote Stella Kyrialides – laquelle avait supervisé les commandes de l'Union européenne pour les vaccins – à Washington comme on le racontait là.
Que les mêmes eurodéputés ont dûment convoqué Ursula Von der Leyen pour explications, comme le révélait le 11 janvier Politico 1, encore un journal américain, information guère reprise par la presse française. Et que, finalement, ils ne l'entendront pas. La présidente de la Commission européenne sera entendue, à huis-clos, et seulement par la conférence des présidents du parlement européen.
Ce qui a fait sortir Michèle Rivasi, l’eurodéputée de la Drôme de ses gonds. “Ces décisions sont gravissimes et sont le reflet d’un entre-soi entre puissants”, réagit la vice-présidente de la commission Covid dans un communiqué publié ce 16 février (article mis à jour le 16 février à 18 heures).
“Le parlement européen participe à l’opacité que nous ne cessons de dénoncer, plutôt que d’obtenir la transparence et de statuer sur les responsabilités”.
On rappellera également que la cour des comptes européenne s’est vu opposer une fin de non-recevoir quand elle a entrepris de demander des comptes à Bruxelles. « Nous avons eu accès aux documents pertinents de la Commission, à l’exception de ceux concernant la participation de la présidente de la commission aux négociations préliminaires avec Pfizer/BioNTech », notait la Cour des comptes dans son rapport spécial.
Que le parquet européen a fini par ouvrir une enquête sur les conditions d’achats des vaccins dans l’UE.
Le New York Times a donc fait ce que tout média normalement constitué aurait dû faire : mettre son nez, et même plus, dans les échanges entre la présidente de la Commission européenne et le PDG de Pfizer. En portant plainte, le quotidien new-yorkais ne fait pas que révéler la corruption, ou tout du moins le manque total de transparence, dans laquelle baignent les institutions européennes : il vient mettre en lumière la passivité et la docilité, et même la servilité, des médias, en France notamment, et en Europe en général.
Il s’est trouvé peu de journalistes sur le continent pour aller creuser l’affaire des SMS initialement révélée par le… New York Times en avril 2021.
C’est en effet Alexander Fanta, un journaliste de Netzpolitik.org, un site d'information en langue allemande sur les droits et la culture numériques qui, réclamant de pouvoir avoir accès aux SMS, avait entrainé l’enquête de la médiatrice européenne.
Mais qu’on se rassure. En 2022, la Commission européenne a adopté une législation sur la liberté des médias, visant à protéger le pluralisme et l'indépendance de la presse. Non sans avoir suspendu la diffusion des médias russes dans l’UE.
Politico a été racheté en août 2021 par l’éditeur Axel Springer, le plus important groupe de presse allemand. Dont Bild fait aussi partie. A noter que Bild, le quotidien allemand, avait déposé une série de poursuites contre la Commission européenne pour obtenir la divulgation de documents relatifs aux négociations d’achat des vaccins fabriqués par Pfizer/BioNTech et AstraZeneca.
ARN-messager de l'Argent-roi
Oui mais pourquoi le New-york Times s’ intéresse à la commission européenne les USA n’ ont pas achetés les vaccins en Europe ? Et pourquoi un seul journal dans toute l’ Europe pour en parler ?