[ Vaccins ] La transparence sur les contrats, faux combat ?
Le manque de transparence autour des contrats signés entre Bruxelles et les laboratoires ressemble à un combat d'arrière-garde. La Commission européenne s'est pliée aux desiderata des industriels.
Auditionné fin mars en marge de la commission d’enquête du Sénat (sur les pénuries de médicaments) sur le scandale qui secoue Pfizer et la Commission européenne à propos des contrats de vaccins contre le Covid-19, le président de Pfizer France Reda Guiha a botté en touche.
« Pourquoi les contrats qui ont été signés avec Pfizer et la Commission européenne n’ont pas été rendus publics, notamment celui de 1,8 milliard de doses ? », a interrogé Laurence Cohen (groupe Communiste républicain citoyen et engagé, CRCE).
« Cette partie relève vraiment du secret des affaires. C’est la règle que nous avons mise en place », a sommairement répondu Reda Guiha.
Les contrats qui ont été rendus publics – Astra Zenecca, Curevac et Sanofi – l’ont tous été avec des parties caviardées. A l’heure actuelle, on ne sait rien hormis ce qui a fuité de nombreuses clauses, comme celles relatives aux prix, au calendrier, au montant de l’avance versée par Bruxelles ou aux conditions d’exonération.
La Commission européenne a le droit pour elle. De fait, le droit de l’Union est clair. “ Le pouvoir adjudicateur ne divulgue pas les renseignements que les opérateurs économiques lui ont communiqués à titre confidentiel, y compris, entre autres, les secrets techniques ou commerciaux et les aspects confidentiels des offres”, stipule une directive européenne de 2014. Exigence que l’on retrouve du reste dans le code de la commande publique.
Ainsi, rien n’oblige la Commission européenne à céder aux exigences de transparence de la société civile et d’eurodéputés qui depuis plusieurs mois ferraillent pour obtenir les contrats dans leur totalité, et notamment le plus gros d’entre eux, celui signé avec Pfizer. Contrat au cœur de l’affaire qui, depuis le début du mois, a pris une tournure pénale.
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Tempête dans un verre d’eau, et surtout qui risque fort de se terminer en eau de boudin ? Il y a deux ans, en avril 2021, des journalistes de LCI avaient pu consulter le contrat signé par la Commission européenne avec Pfizer/BioNTech. On y apprenait que “la Commission a accepté de payer directement pour les États-membres une avance de frais de 700 millions d’euros (3,5 euros par dose), avant même l’autorisation de mise sur le marché, pour "sécuriser le volume commandé"“. Que le prix du vaccin, négocié à 12 euros, s’est finalement élevé à 15,50 euros la dose hors taxe (prix moyen). Que le contrat consacrait l’irresponsabilité du laboratoire.
Ou que Bruxelles se voyait promettre une ristourne de 2 euros si elle commandait dans les trois mois. On y voit surtout, et cela ne fait pas partie des passages caviardés, que la Commission européenne se voit imposer une obligation de paiement et de diligence selon la formule de Stéphane de La Rosa quand les laboratoires sont pour ainsi dire exonérés de toute obligation clairement stipulée, ouvrant droit à toutes les interprétations juridiques possibles.
“Les références à une obligation de « meilleur effort possible » innervent la quasi-totalité du contrat, qu’il s’agisse de fournir un socle minimal de doses (« initial europe doses », art. 5.1 du contrat), de produire les doses sur des sites industriels situés dans l’Union (le Royaume-Uni étant ici considéré, pour l’interprétation de cette obligation, comme faisant partie de l’Union…. art. 5.4 du contrat) ou encore de livrer des « doses optionnelles », en complément de la livraison initiale de vaccins”, soulignait le professeur de droit public en référence au contrat signé avec Astra Zeneca.
Se tromperait-on de combat ? A ce sujet, nous re-publions une analyse du Groupe d’analyse métropolitain (Gam) parue le 29 janvier 2021, avec l’autorisation de son auteur Pascal Clérotte.
La commission européenne et Astra Zeneca ont publié le contrat qu’ils ont conclu pour la fourniture de vaccin. Gageons que les contrats conclus avec les autres labos sont du même acabit, en particulier en ce qui concerne Pfizer et Moderna.
Et bien sûr tous les chiens de Pavlov sont obnubilés par les parties caviardées du contrat. Ce qui est caviardé relève du secret des affaires et est réellement secondaire. Alors que ce qui pose problème, ce qui importe ne l’est pas et est écrit en toutes lettres.
Cela tient en trois mots: « Best Reasonable Efforts » (autant que raisonnablement faire ce peut).
Cela signifie que :
Astra Zeneca ne consacrera pas plus de ressources au développement et à l’industrialisation du vaccin qu’en temps normal alors que cette entreprise bénéficie d’un contrat ferme et a touché des droits de réservation non-remboursables
La totalité de la responsabilité et des coûts générés par l’urgence incombent à l’Union européenne
En clair, si on veut pouvoir acheter un vaccin à Astra Zeneca rapidement, il faut dans les faits financer (a) son développement, (b) les essais cliniques, (c) les investissements nécessaires à la production, son conditionnement et sa distribution.
Bref, on paie le vaccin (au moins) deux fois, c’est le premier scandale.
Ensuite, quand on précommande et réserve en urgence des vaccins qui ne sont pas encore en production, ce qui importe n’est pas le calendrier de livraison mais bien le calendrier de production, l’existence de la capacité industrielle de fabrication des vaccins et la capacité logistique de distribuer ces vaccins.
Vu l’aspect critique que prête la Commission et les États membres à l’affaire (alors que cette posture est éminemment critiquable car la vaccination n’est d’aucune utilité pour traiter une épidémie parce qu’un vaccin n’est pas un traitement), elle aurait du en toute logique s’inspirer de la manière dont sont gérés d’autres grands contrats publics critiques, les contrats de défense.
Quand on vend des sous-marins, des avions de chasse – quand on vend tout gros système d’armes – le client a le pouvoir de contrôler et d’inspecter le déroulement du projet.
Que ce soit Pfizer, Moderna ou Astra Zeneca, ce qui est fabriqué en Europe sert le monde entier à l’exception des USA et de la Chine. Les prix des vaccins n’étant pas fixes, les labos livrent en priorité ceux qui paient le plus ou offrent des bénéfices collatéraux (comme Israël qui donne à Pfizer l’intégralité des données de vaccination des Israéliens dans ce qui est un gigantesque essai clinique par défaut de consentement. Gros problème éthique : la dernière fois qu’un gouvernement a procédé à des essais cliniques sur des juifs sans leur consentement, c’était où? )
La Commission et les États membres auraient dû en toute logique exiger :
La constitution d’une capacité industrielle et logistique minimale dédiée exclusivement à l’UE, c’est à dire des sites clairement identifiés dont 100% de la production ne sert que l’UE.
Le pouvoir de contrôler et d’inspecter les usines, et systèmes d’information , la production et les stocks.
Interdire l’exportation de doses si les livraisons ne respectent pas le calendrier et quantités.
Au passage, c’est exactement ce que les Américains ont fait. Cent pour cent de la production américaine sert d’abord les USA et il est strictement interdit d’importer le principe actif et le vaccin.
C’est là le deuxième scandale. Mais avec parmi l‘équipe de négociation de la Commission européenne un certain Richard Bergström qui entre 2011 et 2016 était à la tête à la tête d’EFPIA, principal lobby de l’industrie pharmaceutique, qu’attendre d’autre ?
Le troisième scandale concernera les vaccins à ARNm. Nous en parlerons en temps voulu.
On va se rendre compte que le niveau d’incompétence mâtinée à la corruption est tel tant à la Commission européenne, au Conseil européen que dans les États membres, que des mesures bien plus efficaces et bien moins coûteuses que les « vaccins » – par exemple la fermeture coordonnées des frontières nationales au sein de l’UE et l’arrêt total des transports internationaux de passagers pour circonscrire l’épidémie; le financement d’hôpitaux de campagne et de centres de quarantaine aux frontières; le financement d’essais cliniques sérieux de repositionnement d’anciennes molécules- n’ont pas été mises en œuvre.
En clair, on a sacrifié des vies et les économies des pays européens, on a obéré le futur d’au moins deux générations d’Européens au dogme de la libre circulation qui est la première et principale cause de… circulation du virus. En contrepoint répond le dogme du marché et du profit.
Et après ça le roi de France et sa cours nous donnent des leçons d’ économie, de morale et de démocratie.