[ Edito ] MAO, massacres assistés par ordinateur
Combien de temps va-t-on pouvoir rester inactifs face à Israël, un Etat qui a choisi délibérément de se mettre au ban des nations ? Comment pouvons-nous encore nous prévaloir d'un surplomb moral ?
Mise à jour le 14/04/2024.
Comme nous l’avions prévu (nous sommes loin d’être les seuls), l’Iran a riposté à la frappe israélienne sur son consulat à Damas, en arguant de l’article 51 de la Charte de l’ONU. Avec mesure. En envoyant un message clair.
Le passage sous commandement de l’Otan du Charles de Gaulle? N’allez pas chercher plus loin.
Oui, le Hamas est une organisation terroriste et criminelle. Oui, ses dirigeants doivent être débusqués et poursuivis en justice pour les crimes dont ils ont ordonné la commission le 7 octobre 2023.
La Cour de cassation a consacré le 12 mai 2023 la compétence universelle de la justice française pour les crimes de guerre et contre l’humanité. Notre justice peut donc être saisie de tels faits où qu’ils aient été commis dans le monde, par quel que ressortissant de quel qu’Etat que ce soit.
Pourquoi donc le président de la République, le premier ministre, des parlementaires ou d’autres n’ont ils pas saisi la justice des crimes perpétrés par le Hamas, dont la direction est connue ? Pour ne pas déplaire au Qatar qui l’abrite ?
Combien de temps vont durer les atermoiements de ceux qui dirigent nos institutions, qui se contentent d’appeler, communiqué après communiqué, à un cessez-le-feu immédiat pourtant ordonné par le Conseil de sécurité des Nations Unies mais qu’Israël refuse d’appliquer? Les massacres aveugles de civils continuent, la famine est sciemment organisée à Gaza où tout est fait pour rendre impossible le retour des habitants. Cela constitue autant de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
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L’intention de considérer la population civile de Gaza comme une cible légitime a été clairement exprimée au plus haut niveau de l’Etat israélien, par le président Isaac Herzog en personne, dès le début du conflit. Le professeur de droit constitutionnel de l’université de Princeton Richard Falk, l’un des plus grands spécialistes vivant des crimes de guerre et contre l’humanité, estime qu’Israël commet un génocide rendu possible par le soutien occidental.
Comment se fait-il que les assassinats – car prémédités et délibérés – de sept travailleurs humanitaires occidentaux par l’armée israélienne ont provoqué plus d’émotion en Occident que les dizaines de milliers d’innocents écrasés sous les bombes fournies par les Etats-Unis ?
La semaine dernière, on apprenait que l’armée israélienne utilisait un programme d’intelligence artificielle baptisé “Lavander” pour cibler plus de 37 000 personnes qu’elle suspecte de faire partie du Hamas. Pas vraiment la liste de Schindler. Une IA qui seule décide qui tuer par des frappes aériennes, et tant pis si des milliers d’innocents meurent puisque Gaza présente la plus forte densité de population au monde.
Les statistiques donnent froid dans le dos. Pour un combattant de base du Hamas éliminé, plus de 10 civils tués. Pour un “officier” du Hamas traité, plus de 60 civils tués. Pour un responsable du Hamas mis hors d’état de nuire, plus de 80 civils tués. Pour mémoire, les assassinats ciblés par drones dans la zone tribale pachtoune au Pakistan ordonnés par Obama et effectués par la CIA ont présenté un “taux de rendement” de 6%, comprendre que 94% des victimes étaient des civils innocents.
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Leon Panetta, ancien directeur de la CIA et ancien secrétaire d’Etat américain de l’administration Obama qu’on peut difficilement taxer d’anti-israélien, reconnait qu’Israël ne peut pas détruire le Hamas, parce qu'on ne détruit pas une idée. Il avance en revanche qu’il est possible de s’attaquer à la direction du Hamas. Sauf que comme précisé plus haut, cette direction est à l’abri au Qatar, qui est en sus depuis le début du millénaire son principal financeur, à la demande de gouvernements israéliens successifs, avec l’accord tacite des Etats-Unis et du reste de l’Occident.
Les troupes israéliennes se sont retirées de Gaza. Signe d’une défaite annoncée ou bien de la préparation d’une offensive sur Rafah voire, pire, sur le Sud Liban pour confronter le Hezbollah, afin d’entrainer les USA dans une guerre régionale qu’Israël est bien incapable de gagner seule ? Une guerre en fait que l’Occident est dans l’impossibilité totale de remporter. N’est-ce pas la puissante US Navy appuyée par les marines de guerre des pays de l’Otan qui est tenue en échec en mer rouge par des Houthis yéménites mâchant du khat toute la sainte journée ? Tirer des missiles anti-aériens à plus d’un million pièce pour contrer des drones artisanaux ne valant pas 10 000 dollars, belle illustration du principe de l’économie des forces.
Si Tsahal s’aventure au Liban, elle connaîtra le même sort qu’en 2006, en bien pire, puisque le Hezbollah dispose aujourd’hui de capacités de frappe susceptibles de causer d’immenses dégâts au cœur de l’Etat hébreu. Israël sera-t-elle alors tentée de procéder à une ou plusieurs frappes nucléaires tactiques, ouvrant la boîte de la Pandore que personne ne pourra refermer?
Le Ramadan touchant à sa fin, quelle va être la riposte de l’Iran au bombardement de son consulat à Damas, un autre crime israélien ? La République islamique ne peut laisser cet acte impuni. Va-t-elle s’attacher à toucher quelques cibles de haut profil tout en assurant de causer le moins de dommage possible, histoire de faire passer le message que ses capacités conventionnelles lui suffisent pour mettre l’Etat hébreu à genoux ?
En fait, déminer la poudrière du Moyen-Orient est simple. C’est une question de bon sens. Cela relève de la psychologie de cour d’école : quand deux élèves se battent, on ne se préoccupe pas de savoir qui a commencé et on inflige aux deux la même punition réprimant le fait de se battre.
Le gouvernement israélien utilise les crimes du Hamas, un acteur non-étatique, pour justifier ses propres crimes qui ne relèvent pas de la légitime défense mais de la poursuite d’autres buts. Israël refuse d’appliquer le droit international. Le peuple israélien soutient dans sa grande majorité - plus de 80% selon les sondages - le gouvernement israélien. Israël a donc fait le choix souverain de se mettre au ban des nations. L’ensemble de l’opinion publique mondiale, y compris aux USA, ne s’y trompe pas. Israël a déjà perdu cette guerre politiquement. Une bien improbable victoire militaire n’y changera rien. Dont acte.
Quelques mesures simples pour les massacres cessent.
Lancer des poursuites pénales en France contre la direction du Hamas pour crimes de guerre et contre l’humanité et s’assurer que ses sources de financement, notamment en provenance du Qatar, se tarissent.
Lancer des poursuites pénales en France contre les membres du gouvernement israélien et l’état major de Tsahal pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
Bien faire comprendre à ceux qui importent en France un conflit qui n’est pas le nôtre, propalestiniens comme pro-israéliens, qu’ils encourront des poursuites pénales pour apologie du terrorisme, de crimes de guerre et contre l’humanité, voire pire le cas échéant (titre 1er du code pénal).
Rétablir une obligation de visa pour les ressortissants israéliens souhaitant se rendre en France.
Ne plus reconnaître la double nationalité franco-israélienne. Toute personne majeure devra démontrer son renoncement à la nationalité israélienne pour conserver la française.
Imposer des sanctions à toute entreprise – française, européenne et autre – fournissant des armes aux belligérants et/ou investissant dans l’industrie de défense israélienne.
Rétablir le contrôle des capitaux entre la France et Israël, que les mouvements soient directs ou indirects.
Les cinq dernières mesures ne seront levées que quand le respect sincère et durable du droit international sera constaté. Pour les poursuites pénales, la justice suivra son cours.
Il ne s’agit en rien de mesures radicales. Les deux belligérants - l’un étatique, l’autre non-étatique- sont traités de la même manière. C’est également une façon juste de mettre le peuple israélien devant ses responsabilités. Aucune amitié n’est inconditionnelle.
C’est à ce seul prix que la France pourra regagner un peu de crédibilité sur la scène internationale. Pour cela, il faut un courage politique qui n’existe pas chez ceux qui nous gouvernent. Et le changement de l’ensemble du personnel est une condition nécessaire, mais loin d’être suffisante.
Bravo Pascal pour cet article qui comme vous le dites si bien…, avec un peu de courage de nos dirigeants, une solution pourrait émerger. Merci pour vos articles qui sont tous d’une qualité et d’une véracité incroyable. Cordialement.
"Lancer des poursuites pénales en France contre la direction du Hamas pour crimes de guerre et contre l’humanité et s’assurer que ses sources de financement, notamment en provenance du Qatar, se tarissent."
C'est absurde
Les négociations ne se feront que avec le Hamas qui est l'unique émanation politique légitime des Gazaouis. Qui est de facto un acteur étatique, par défaut.
Quand on veut faire la paix, on ne pourchasse pas les dirigeants.
Ceci dit personne ne veut faire la paix, c'est tout le problème.
Jacques Baud explique que les massacres du 7 octobre sont en majorité dues à des frappes israéliennes dont le but était d'empêcher toute prise d'otage, quel que soit le coût en vies israéliennes, selon la directive Hannibal, comme l'a expliqué la presse israélienne.
Echec total, côté prise d'otages, mais ce sont les roquettes des hélicoptères qui ont massacré les civils, le Hamas souhaitant lui, des otages vivants.