[ Flash ] Albiez : de l'eau dans le gaz
A Albiez, la question de la gestion de l'eau potable est symbolique de la turbidité dans laquelle baigne cette petite station de ski de Savoie.
« Il y a de l’eau dans le gaz ». A Albiez, et alors que la commune patauge dans ses affaires sur lesquelles la justice dira s’il y a eu petit ou gros arrangements, certains n’ont pas seulement le sens de la formule. Car la petite commune de Savoie entend rebattre les cartes de la gestion, par la communauté de communes, de l’eau potable.
Le dossier comme ses finalités, alors que le prix de l’eau à Albiez atteint des sommets – ce que le changement de régime d’exploitation1 ne devrait d’après nos informations guère améliorer – est symbolique. D’abord parce que l’eau à Albiez est un sujet pivot. On se rappelle que le préfet a gelé les permis de construire de cette petite station de ski de Maurienne, dans l’attente que celle-ci sécurise son approvisionnement en eau potable. Or, pour beaucoup, les constructions sont le seul ballon d’oxygène pour cette commune lourdement endettée, sommée en 2018 d’augmenter ses impôts et de mettre un coup d’arrêt à ses investissements pour pouvoir … sortir la tête de l’eau.
Symbolique parce qu’elle illustre aussi la mauvaise passe financière, qui dure, de cette petite station de ski de Savoie, et des relations conflictuelles qui en grèvent le quotidien. Et qui a trouvé illustration le 1er mars dernier quand les élus de la communauté de communes sont venus, sans le maire d’Albiez, couper pour le geste l’eau à une résidence de tourisme qui ne payait plus ses factures d’eau depuis des années, résidence propriété du “groupe” de Bernard Bensaïd, qui a racheté le Groupe hospitalier mutualiste à Grenoble.
Symbolique aussi des dossiers gérés de manière opaque et pas vraiment dans les règles de l’art, dans une certaine confusion des rôles et qui ont éclaté à la publicité de l’ouverture d’une enquête judiciaire pour prise illégale d’intérêt et favoritisme.
« On a vendu tous les bijoux de famille. Désormais, si on a un déficit de 300 000 euros, on met la clé sous la porte ! », témoigne un de nos interlocuteurs. Un des derniers bijoux de famille à avoir été vendu est le gîte de la Villette. Si on y revient une nouvelle fois, et plus en détails, c’est parce que rien dans la procédure qui a accompagné la vente n’est, là aussi, très clair.
Reprenons la chronologie des faits. Le gîte a été officiellement vendu – foi d’acte notarié en notre possession – le 6 août. Soit quatre jours après que la vente a été votée par les élus en conseil municipal. Et sa publicité faite sur les réseaux sociaux le… 31 mai (avant que le post ne soit partiellement supprimé). Une affaire rondement et promptement menée ?
Le nouveau propriétaire paie cash – 485 000 euros – l’ancienne école qui au début des années 2000 avait fait l’objet de 750 000 euros de travaux pour être convertie en gîte. Il a aussi été mis en relation avec le maire par l’entremise d’un des fils du maire, alors entraineur de l’équipe de France de ski de bosses, dont il est le partenaire. Court-circuitant SSIT et sa filiale immobilière Destination Montagne avec qui avait été signé le mandat exclusif de vente, et à qui seront versés, non sans quelques grincements de dents, des honoraires d’un montant de 35 000 euros.
Certes, les candidats à ce rachat ne se pressaient pas. Du reste, la mairie n’avait trouvé personne pour acheter le gîte moyennant mise en location. Mais la gestion pour le moins familiale de cette vente – au regard également de nombreux autres dossiers comme relaté dans cet article – et sur laquelle le maire n’a jamais apporté de réponse 2 laisse circonspect.
En attendant, pour certains, il semble urgent de prendre de la distance – et surtout de le faire savoir. « Je suis au milieu d’un truc pas réel, proteste Christophe Michaud, le nouveau propriétaire du gîte. Je suis arrivé dans ce village et on m’a mis dans une catégorie ». Lui se défend d’être associé au fils du maire, lequel proteste tout autant et dit ne rien à voir avec les affaires de son père. Pas associés ? Sur le gîte s’entend.
Car Christophe Michaud et Ludovic Didier ont en 2020 fondé WAD, pour We Are Different, une association créée pour “faire du business” et qui deviendra le partenaire de l’équipe de France de ski de bosses. Association que l’on retrouvera en 2021 à L’Alpe d’Huez où elle était chargée de la conception de la piste pour la coupe du monde. Rien à voir avec Albiez ? Il y a des similitudes. Dans cette station phare de l’Isère, on construit à perte de vue avec l’ambition de développer le ski, tout en misant sur une liaison inter-stations que contestent les associations de protection de l’environnement.
Une piste en butte à une ressource en eau limitée. « Cette piste sera enneigée au détriment d’un autre secteur, par choix de priorité », soulignait l’autorité environnementale à l’examen du projet. Entre autres griefs.
« Est-ce que pour une épreuve de ski de bosses, sport en perte de vitesse, on se permet de défoncer un pan de montagne que l’on équipe de canons à neige, de dépenser 200 000 euros de budget à l’Office de tourisme et vraisemblablement bien plus en dépenses diverses et variées ? » pointe l’élu d’opposition Gabriel Chamouton.
Cette question, d’autres élus se la sont posée. A Mégève. Là, la commune a décidé de faire un pas de côté en annulant une étape de la coupe du monde de ski cross, prévue en janvier 2023, pour cause de sécheresse, craignant ne pouvoir produire suffisamment de neige de culture.
Continuez votre lecture avec un essai gratuit de 7 jours
Abonnez-vous à L'Eclaireur - La Lettre des Alpes pour continuer à lire ce post et obtenir 7 jours d'accès gratuit aux archives complètes des posts.