[ Groupe Avec ] Opération banqueroute
Bernard Bensaïd, le PDG du groupe Avec utilise les entités médico-sociales à but non lucratif qu'il contrôle comme les banques de ses sociétés commerciales.
A L’Eclaireur, nous nous interrogeons sérieusement sur l’intérêt qu’il y a à ce que nous poursuivions notre profession de journaliste. Ne serait-il pas plus lucratif d’être prospecteur d’or, de diamant ou de pétrole ? La richesse ne serait-elle pas à la pointe de nos pics et au bout de nos pelles ? Car plus nous creusons dans les affaires de Bernard Bensaïd, le PDG du groupe Avec, plus nous trouvons.
Cet article revêt un intérêt public, nous le laissons donc en accès libre.
Il est le résultat d’une enquête d’une quinzaine d’épisodes parus à ce jour, un travail débuté il y a près d’un an et qui se poursuit encore. Afin de garantir sa totale liberté et son indépendance, L’Eclaireur a fait le choix de ne pas faire appel à la publicité pas plus qu’au financement participatif, ni à aucune aide publique ou privée. Nos informations, notre liberté et notre indépendance ont un coût : celui de vos abonnements.
Note: une fois de plus, de manière inexplicable, l’application Substack a publié un brouillon et non pas la version définitive de l’article. Nous nous en excusons.
Thierry Carron, le délégué syndical FO et secrétaire du Conseil économique et social du Groupe hospitalier mutualiste de Grenoble (UMG-GHM) nous a rapporté que le conseil d’administration présidé par Paul de Rosen a voté, en présence de Bernard Salzmann, directeur financier et des ressources humaines du “groupe” Avec, le principe de rembourser les 6,5 millions ponctionnés à la trésorerie de l’UMG-GHM (ayant mené à la mise en examen de Bernard Bensaïd pour détournements de fonds publics), non pas cette année comme le prévoient les conventions de prêt, mais sur 9 ans, au rythme de 722 000 par an. En donnant au GHM l’usufruit - les loyers - des murs d’un Ehphad, la Maison des roses, sis à Valencienne et exploité par l’association mosellane d’aide aux personnes âgées (Amapa) présidée par Bernard Bensaïd, murs qui sont la propriété d’une SCI dont Bernard Bensaïd est le principal bénéficiaire.
Un nouveau document interne au “groupe” Avec nous a été transmis (dont nous avons vérifié l’authenticité). Nous le publions. Il illustre la manière dont M. Bensaïd utilise les entités à but non lucratif du “groupe Avec” comme des banques permettant de financer l’acquisition d’actifs par ses sociétés commerciales.
L’achat des murs de l’Ehpad “La maison des roses” a été financé par l’Amapa sous la forme d’un prêt de 1,5 million d’euros et d’un compte courant d’associé créditeur au 30 septembre 2022 de 4,7 millions. Cela signifie que l’Amapa a prêté sur ses fonds propres cette somme à la SCI. Ce afin que la SCI puisse faire face au remboursement du crédit vendeur sans intérêt que lui avait accordé la Congrégation des petites sœurs des pauvres. Contactées par nos soins, les petites sœurs des pauvres nous ont confirmé que la totalité des 7,5 millions d’euros de la vente a été payée, non sans difficultés.
L’Amapa a financé 75% de l’acquisition des murs mais ne détient que de 20% des parts de la SCI dont Bernard Bensaïd est bénéficiaire à 92%, si l’on en croit Pappers.fr. En clair, Bernard Bensaïd a transformé des fonds propres de l’Amapa, une association de droit local d’Alsace-Moselle, en patrimoine immobilier dont il peut disposer à sa guise. Au 30 septembre 2022, il avait fait “sortir” 6,2 millions d’euros de l’Amapa sur le fondement d’opérations intercos (inter-compagnies).
Or, d’après des sources indépendantes et concordantes, l’Amapa est aujourd’hui dans l’incapacité de payer ses charges et de faire face à sa dette sociale et fiscale. Il est légitime de s’interroger sur la nature d’une gestion qui consiste à utiliser des fonds propres pour financer des opérations immobilières externes à l’Amapa dont elle n’est pas la bénéficiaire plutôt que d’assumer les charges de son exploitation.
Le montage de l’acquisition de La maison des roses est intéressant. L’Amapa est rentrée au capital de la SCI Valenciennes le 28 décembre 2020, 11 jours après la signature de la promesse de vente avec la Congrégation des petites sœurs des pauvres. Dans ces conditions, le financement de l’acquisition par l’ Amapa est-elle licite ? La modification de la composition du capital social de la SCI n’a été en revanche déposée au greffe du tribunal de Paris que deux ans après, le 16 août 2022. La SCI Valenciennes elle a été constituée le 09 mars 2018 par les sociétés Doctegestio (devenue Avec) et DG Investissements, filiale d’Avec.
Un expert proche du dossier analyse : “En synthèse, l’Amapa assume un risque bien au-delà de sa propriété réelle. C'est à se demander pourquoi l'Amapa n'a pas procédé directement à l'acquisition... Au surplus, l’Amapa a investi des fonds importants alors qu'elle restait à devoir des sommes importantes (prêts garantis par l’Etat etc...). In fine, les créanciers non payés de l'Amapa permettent en réalité à DG Investissement d'accroître ses actifs immobiliers, sans prise de risque proportionnelle.”
Résultat des courses? Au 30 septembre 2022, les créances détenues par ses associés sur la SCI Valenciennes en premier desquels l’Amapa n’avaient toujours pas été remboursées. Ce qui signifie que la SCI Valenciennes ne vaut rien, sont passif étant presque équivalent à la valeur des murs qu’elle détient.
L’Amapa a non seulement financé l’acquisition, mais elle est remboursée de ses créances en ne versant pas de loyers à la SCI Valenciennes. Loyers que le “groupe” Avec se propose de substituer aux remboursement des prêts tirés sur la trésorerie de l’UMG-GHM, dont le rachat n’était pas plus financé que celui des murs de La maison des roses. Bernard Bensaïd créé ainsi ses propres effets de levier au sein de son “groupe” (qui n’existe pas) par des opérations intercos en transmutant des trésoreries en créances sur des actifs peu liquides… Autant dire qu’en l’état, l’UMG-GHM n’est pas prêt de revoir les millions ponctionnés à sa trésorerie. Et que le versement des loyers va aggraver la situation de l’Amapa, déjà dans les faits en cessation de paiement puisque ne disposant pas des fonds nécessaires au paiement de ses charges sociales et affichant une dette sociale de plus de 10 millions d’euros…
Le”groupe” Avec est bien une usine à dettes. Comme nous l’avons déjà montré dans l’article ci-dessous à propos de ses activités d’hébergement-hôtellerie :“Le système Bensaïd” repose sur un principe simple : remplacer l’argent sonnant et trébuchant des filiales d’exploitation par des créances sur leurs sociétés-mères qu’il contrôle (donc créer des actifs). Afin de faire remonter les fonds jusqu’à sa holding personnelle, la société anonyme Avec, ou toute autre société de son “groupe” partie à une convention de trésorerie ou disposant d’un compte courant d’associé (donc créer de la dette).”
Nous venons de voir que ce système est également appliqué dans le secteur médico-social, alors que le groupe “Avec” est dans les faits en cessation de paiement. Le document interne “prévisionnel de trésorerie” que nous avons publié parle de lui-même.
La même question se pose encore et encore : que font le gouvernement, Bercy, le ministère de la Santé, les agences régionales de santé, les Conseils départementaux ? Que font les tutelles et les financeurs publics ?