[ Groupe Avec ] L'Appui de Bernard Bensaïd
AAPPUI est une association d'aide à domicile basée en Isère. La manière dont Bernard Bensaïd, placé en garde à vue, l'a "reprise" est l'épitomé de ce secteur non-concurrentiel à la dérive.
Mise à jour le 11/01/2023: Bernard Bensaïd a été présenté au Parquet, qui a décidé de la suite à donner à la procédure. Il a été placé sous contrôle judicaire et sera présenté à aux d’instructions, puisque qu’une co-saisine a été demandée, c’est à dire la nomination de plusieurs juges d’instruction pour diriger l’enquête.
Communiqué du parquet de Grenoble.
Le parquet de Grenoble a ouvert une information en requérant une co-saisine et un placement sous contrôle judiciaire à l’égard de M. Bernard BENSAID, président du conseil d'administration et directeur général de la société anonyme AVEC, et président du conseil d'administration et directeur général (du 9/10/2020 au 30/03/2022) de l'union mutualiste pour la gestion du groupe hospitalier mutualiste de Grenoble (UMG-GHM), établissement de santé privé d'intérêt collectif.
Les infractions reprochées à Bernard BENSAID sont :
- La prise illégale d’intérêts par un chargé de mission de service public dans une affaire dont il assure l’administration ou la surveillance, par la signature d’une convention de prestation de services entre la société AVEC et l’UMG-GHM ayant généré une facturation de 4.212.335 euros.
- Le détournement de fonds publics, en ayant fait percevoir par la société anonyme DOCTEGESTIO devenue AVEC la somme de 6,4 millions d'euros provenant de l'UMG-GHM, par l'intermédiaire de la mutuelle DOCTOCARE. Le recel des deux infractions est reproché à la société anonyme AVEC.
Bernard BENSAID sera présenté aux juges d’instruction dans l’après-midi. Un communiqué sera envoyé à l’issue de la présentation.
François Touret - de Coucy, procureur adjoint
La garde à vue de Bernard Bensaïd a été prolongée de 24 heures à compter du 10 janvier au matin. Il doit s’expliquer devant les enquêteurs de la PJ financière de Grenoble de soupçons de prise illégale d’intérêts et de détournements de fonds dans sa gestion du Groupe hospitalier mutualiste (GHM) de Grenoble suite à une plainte de deux syndicats, FO et CGT.
Au sein du “groupe” de M. Bensaïd, on déclare que “les accusations contre X ne sont pas fondées en droit et qu'elles s'inscrivent dans un combat procédurier d'opposition au groupe Avec”. Une garde à vue n’est pas une mise en examen et encore moins une condamnation. Rappel élémentaire, M. Bensaïd bénéficie de la présomption d’innocence.
A 6 h 30 tapantes le 09 janvier, deux heures avant son interpellation par la police à Paris, Bernard Bensaïd a envoyé le courriel reproduit ci-après à l’ensemble du personnel du GHM. Un des récipiendaires nous l’a fait parvenir.
Chers tous et toutes,
J’ai le plaisir de vous informer de l’arrivée de votre nouveau directeur général le 6 février 2023, Monsieur Pascal Bonafini, anciennement directeur général adjoint du CLCC Henri Becquerel (centre de lutte contre le cancer, ndlr) à Rouen et plus récemment directeur général du CH de Saint Joseph - Saint Luc à Lyon.
J’ai également le plaisir de vous annoncer la promotion de Madame Magalie Wallner au poste de Directrice de l’etablissement support.grenoble pour lequel je lui souhaite une pleine réussite professionnelle. Enfin, je vous informe que Madame Wallner assurera la direction générale par interim de l’UMG-GHM dans l’attente de l’arrivée de Monsieur Pascal Bonafini. Encore bonne année à tous et toutes.
Cet e-mail annonce la nomination au poste de directeur général du GHM de M. Pascal Bonafini, qui siège depuis septembre 2017 à la Commission de certification des établissements de santé de la Haute autorité de santé (HAS), entre autres fonctions. Cette nomination a été annoncée avant la tenue du conseil d’administration pourtant seul organe habilité à désigner un nouveau directeur général.
Outre ce dérangeant mélange autorités publiques-secteur privé, ces discrets liens d’intérêts qui semblent être la norme dans les “groupes” de santé à but lucratif comme non lucratif, est-ce l’illustration des méthodes de gestion de M. Bensaïd, qui déciderait de tout tout seul, personnellement à la tête de plus d’une centaine d’entreprises parties prenantes d’un “groupe” qui n’existe pas, au mépris des obligations prévues par la loi ? La gouvernance, une simple formalité d’ennuyeuse paperasse ?
Ci-après les précédents épisodes de notre enquête, par ordre chronologique. Ils vous permettront de forger votre propre opinion sur une partie de la réalité du “groupe” Avec, sa mauvaise santé financière et sur ce qui a conduit des syndicats à porter plainte et la justice à ouvrir une enquête. Important de les lire si vous voulez appréhender les prochains volets.
Ne vous y trompez pas. Dans le contexte actuel, le “groupe” Avec qui pourrait voir l’Etat et les collectivités devoir mettre sous administration provisoire plusieurs dizaines d’entités pour leur éviter le dépôt de bilan, est une bombe à retardement sur laquelle est assis le gouvernement d’Elisabeth Borne, et par ricochet Emmanuel Macron. En arrière plan, c’est bien la réalité et la qualité du contrôle des tutelles qui interroge.
Nous vous conseillons également de lire l’excellente et exhaustive enquête sur le groupe SOS, autre mastodonte du secteur, parue dans Le Monde Diplomatique de ce mois. Si sa gestion est moins baroque que celle du “groupe” Avec, ce groupe associatif pose néanmoins des problèmes d’un autre ordre et n’est pas forcément plus transparent. Notamment en ce qui concerne la manière dont des fonds publics dédiés à des secteurs non-concurrentiels pourraient abonder au développement d’activités concurrentielles.
Comment en est-on arrivé là ?
C’est le résultat d’un désengagement de l’Etat des services publics obligatoires. Et ce pour des motifs comptables qui ne trouvent de justifications qu’idéologiques : un système de délégation de service public dans lequel interviennent d’innombrables acteurs coûte plus cher au contribuable que si l’Etat produit lui-même le service. Parce que les surcoûts bureaucratiques nécessaires pour contrôler la gestion déléguée doivent être poussés jusqu’à l’absurde et n’amènent en aucun cas les économies promises. A t-on vu depuis trente ans les effectifs de la fonction publique diminuer ?
Penchons-nous maintenant sur l’association d’aide et d’accompagnement à domicile basée à Meylan dans l’agglomération grenobloise, l’association AAPPUI, “reprise” par le “groupe” Avec et Bernard Bensaïd en décembre 2018. Un cas d’école qui expose comment des acteurs à but lucratif peuvent mettre la main sur des associations agréées opérant dans un secteur non concurrentiel financé principalement par des fonds publics. Sans investir un centime, et avec l’assurance de recettes financées par le contribuable.
Fondée en 1997, l’association Aide aux personnes par une intervention (AAPPUI) offre des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) aux personnes âgées et handicapées à Meylan et dans les communes avoisinantes. Elle fait partie des 184 structures agréées qui opèrent dans ce secteur non concurrentiel en Isère.
Contrairement à celui concurrentiel des services à la personne où le prix des prestations est fixé librement par les prestataires, celui-ci est principalement financé par une prise en charge fixe des prestations fournies aux bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie et de la prestation de compensation de handicap payée par le Département de l’Isère. Il faut donc bénéficier d’un agrément et remplir un certain nombre de critères pour être un SAAD.
Le vaste secteur des aides et soins à domiciles compte les employés parmi les plus précaires et les plus mal rémunérés de France. Au point où il est devenu quasiment impossible pour certains opérateurs de recruter, tellement les salaires sont bas et le travail à forte pénibilité. Servitude 2.0 organisée par l’Etat et valorisée par l’altruisme, alors qu’il s’agit dans la plupart des cas de tâches (de) domestiques, même si le contact humain y est une réalité.
L’Etat français, par une logique strictement comptable, préfère se décharger depuis 25 ans de ses responsabilités sur des acteurs privés et la loi du marché. Sauf quand, pour des raisons bassement électorales à court terme, l’existence d’allocations spécifiques ou de services réellement publics, s’avère payante.
Il y a un an, nous avons décrit les effets calamiteux de 25 ans de politique de gribouille dans la prise en charge du handicap, oscillant entre incantations et clientélisme électoral. En décrivant la réalité d’un secteur dévasté mais consciencieusement exploité à des fins de communication alors que le mantra “inclusif” est aussi éculé qu’inopérant. Les sempiternels exemples scandinaves à ne pas suivre car procédant d’une idéologie viscéralement utilitaire au point de frôler l’eugénisme n’opèrent pas plus.
Les services d’aide et d’accompagnement à domicile, qui ont pour vocation d’éviter le placement en institution de personnes âgées dépendantes et de personnes handicapées qui ne le nécessitent pas, sont dans une situation équivalente. Prises entre le marteau de financements insuffisants alors que les départements font tout ce qu’ils peuvent avec leurs ressources limitées et l’enclume de politiques nationales technocratiques qui ne répondent ni à la réalité ni aux besoins, de très nombreuses associations opèrent depuis des années au bord de la cessation de paiement et du redressement judiciaire – quand elle ne déposent tout simplement pas le bilan.
AAPPUI n’est pas une exception. Confrontée à une situation financière dégradée en 2018, elle a fait le choix de s’adosser au “groupe” Avec, nous relate Sandrine Chaix, présidente de l’association à l’époque. Mme Chaix, conseillère régionale Auvergne Rhône-Alpes depuis 2016, est aujourd’hui 3e vice-présidente déléguée à l'action sociale et à l'handicap dans l’éxecutif de Laurent Wauquiez, ainsi qu’attachée du groupe d’opposition Communes au cœur de la Métropole au conseil métropolitain de Grenoble Alpes Métropole.
Mme Chaix a été rémunérée durant son mandat de présidente de AAPPUI, comme le montre sa déclaration d’intérêts à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.
Suite à une participation à un salon consacré à l’aide et à l’accompagnement à domicile lors duquel Bernard Bensaïd avait présenté les activités de sa société Doctegestio (devenue aujourd’hui Avec), la décision fut prise par le conseil d’administration d’AAPPUI de s’en rapprocher. Sandrine Chaix insiste sur le fait que le choix du “groupe” Avec répondait également à sa volonté d’éviter tout conflit d’intérêt en sélectionnant un repreneur hors de la région où elle était élue.
Qu’entend-on par “reprise” d’une association, qui ne possède pas de capital social et ne peut donc pas être rachetée? Tout simplement la reprise du conseil d’administration existant d’AAPPUI par Bernard Bensaïd qui en exerce la présidence. Et la nomination d’administrateurs “proches” de lui, pour ne pas dire des hommes de paille, employés de ses sociétés ou d’une association qu’il préside. Comme son fils Jacob Bensaïd ou des personnes morales (les sociétés Doctegestio et DG Help, l’association AMAPA) qu’il dirige.
Ce fut chose faite le 6 décembre 2018, déclaration déposée en préfecture le 30 janvier 2019 à l’appui.
A noter qu’au 6 décembre 2018, Sandrine Chaix restait vice-présidente de AAPPUI et que deux administratrices conservaient également leur siège au conseil d’administration, Annie Chardon et Anne-Sophie Maurin.
Bernard Bensaïd avait donc au 6 décembre 2018 le contrôle effectif de l’association AAPPUI. Mais en échange de quoi ? De la mutualisation des services généraux - ressources humaines, comptabilité, paie, juridique, informatique etc., nous a affirmé Sandrine Chaix. Services fournis par qui ? L’association AMAPA ou bien la société Doctegestio, devenue Avec? A notre question de savoir sous quelle forme et à quel prix a été conclu l’achat de ces services, Mme Chaix nous a répondu qu’ils n’étaient pas facturés du fait du mauvais état des finances de l’association.
Quel intérêt aurait un “groupe” composé de sociétés commerciales et d’une association à fournir des services gratuitement à une association, c’est à dire les fournir à perte ?
Que Mme Chaix, élue régionale de la majorité de Laurent Wauquiez et attachée d’un groupe politique d’opposition de droite à la Métropole de Grenoble “continue son travail auprès du Département pour obtenir toutes les modifications tarifaires attendues” quand l’exécutif dirigé par Jean-Pierre Barbier et la majorité départementale sont également de droite, n’est-il pas problématique ? A moins qu’il ne s’est s’agi de la conception et de la négociation du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens afin qu’AAPPUI ait pu bénéficier de dotations complémentaires au tire de l’amélioration de ses services.
A notre seconde question de savoir si Bernard Bensaïd personnellement ou une de ses sociétés ou l’association AMAPA qu’il dirige avaient contribué financièrement à AAPUI sous la forme d’un apport temporaire de trésorerie pour garantir la poursuite de l’activité, Mme Chaix nous a d’abord répondu par la négative, avant de se demander si une avance n’avait effectivement pas été versée. Au titre de quoi et sur quelle base légale, elle ne le savait pas.
Le 9 septembre 2019, nouveau changement de la composition du conseil d’administration de AAPPUI. Exit Mesdames Chaix, Chardon et Maurin. Ne reste plus comme président Bernard Bensaïd; comme trésorier Hervé Guibert (le directeur financier de Doctegestio, employé de M. Bensaïd); comme administrateurs Jacob Bensaïd, les sociétés Doctegestio et DG Help dirigées par Bernard Bensaïd et l’association AMAPA, présidée par Bernard Bensaïd.
M. Bensaïd a disposé depuis du plein et complet contrôle de l’association, sans que cela ne lui ait coûté un centime.
Quel intérêt présente la reprise d’une association pour deux sociétés commerciales et une association de droit local d’Alsace-Moselle ? L’argument systématiquement avancé par Bernard Bensaïd est la sauvegarde d’emploi. 180 postes chez AAPPUI, nous dit-on.
L’écrasante majorité - 171 sur 180 employés - des salariés d’APPUI sont des intervenants fournissant des services d’aide et d’accompagnement à domicile à des bénéficiaires d’allocations qui ne disparaissent que quand ils décèdent.
Les employés d’APPUI, peut-être à l’exception de la direction et des administratifs, auraient retrouvé un emploi sans difficulté aucune. Les CDD sont (malheureusement) la norme dans le secteur, la rotation du personnel y est importante et il est en manque chronique de main d’œuvre. L’argument de la sauvegarde de l’emploi paraît alors peu solide.
C’est en fait l’accès aux bénéficiaires qui importe aux opérateurs, plus que la sauvegarde de l’emploi. Les bénéficiaires sont “captifs” sur une période de temps connue, car liés par contrat à l’association, qui a l’assurance de voir ses prestations payées.
Arrêtons-nous un instant pour faire un petit calcul de coin de table. Un pur exercice de gymnastique intellectuelle sur des bases parfaitement hypothétiques. Un “brain teaser” comme on dit chez McKinsey.
AAPPUI est une association agréée qui fournit des services d’aide et d’accompagnement à domicile à des allocataires, services financés par le Département selon une tarification horaire fixe se montant depuis 2018 à 21,44 euros.
Au moment de sa “reprise”, AAPPUI servait 284 bénéficiaires. Posons 10 heures d’aide par semaine en moyenne par bénéficiaire. Le chiffre d’affaires généré avec les bénéficiaires d’allocation par semaine est donc de 10 x 284 x 22,44 = 63 730 euros. Soit 254 920 euros par mois et 3 059 000 euros par an. Recettes quasi garanties et en augmentation potentielle du fait du vieillissement de la population.
La première conséquence de cela est que les banques n’auront aucune objection à accorder des découverts ou des facilités de trésorerie à AAPPUI, puisque le risque de défaut de remboursement est quasi nul à partir du moment où la dette à court terme ne met pas l’association au bord de la cessation de paiement durant l’exercice et que les comptes sont couverts (à zéro ou en positif) à la fin de l’exercice. D’après les informations que nous possédons, AAPPUI a présenté un compte administratif (c’est à dire les comptes ne concernant que les prestations financées par le Conseil départemental utilisées à fins de contrôle par les tutelles) en déficit chaque année, de l’ordre de 300 000 euros.
Posons que les banques autorisent 10% des recettes de facilité de trésorerie, soit 300 000 euros intérêts inclus. Multipliez cela par près d’une centaine d’associations agréées contrôlées par Bernard Bensaïd. Voilà un “volant” de financement cumulé à court terme, à 12 mois maximum ou “revolving” de l’ordre de 30 millions d’euros ...
La deuxième conséquence est qu’il est possible, afin de faire sortir des fonds de l’association, de facturer des “frais de siège” calculés en pourcentage des recettes, comme on l’a vu au GHM, et autres prestations fournies par une société commerciale dirigée par M. Bensaïd. Y compris en faisant financer ces prestations par les découverts et facilités de trésoreries accordées par les banques. L’argent en est définitivement sorti. Il est passé d’une entreprise à but non lucratif opérant dans un secteur non concurrentiel à une société commerciale, à but lucratif. Si les prestations ne sont pas réelles ou si leur prix est abusif alors l’association a été vampirisée.
La troisième conséquence est la possibilité de faire remonter ni vu ni connu au sein d’un ou plusieurs véhicules présentés comme des maisons-mère – le “cash pooling” – les liquidités issues des découverts, facilités de trésoreries etc. comme d’éventuels excédents de trésorerie afin de financer d’autres charges ou opérations en tout genre au sein d’un groupe qui n’en est pas un, dont les entités le composant n’ont pour point commun que d’avoir Bernard Bensaïd comme dirigeant. C’est illicite, en particulier avec des entités à but non-lucratif qui par définition ne peuvent pas avoir d’autres liens entre elles que contractuels. Liens contractuels qui sont susceptibles de constituer des prises illégales intérêt si des contrats sont signés avec soi-même. C’est de la cavalerie. Et c’est le principe de la pyramide de Ponzi. Certains, se fourvoyant, disent “solidarité”.
Tout cela est très risqué. Financièrement comme juridiquement. Cela revient à traverser un champ de mines des semelles de plomb de scaphandrier aux pieds. Il s’agit donc de rester le plus discret et surtout le plus opaque possible. En actionnant un inextricable maquis de petites entités entre les lesquelles on fait circuler en permanence des sommes de faible importance, mais qui, additionnées, donnent le vertige. Comme les chiffres ci-après, qui ne sont pas des données comptables, présentés dans le rapport d’activité 2020 du “groupe” Avec.
La démonstration que nous venons de faire est, une fois encore, hypothétique. Rien ne dit à ce stade de notre enquête montre que c’est le “business model”, le modèle économique du “groupe” Avec. Nous n’avons pas non plus les moyens de le démontrer puisqu’il nous faudrait pour cela avoir accès aux comptes en banque de toutes les personnes morales composant le “groupe” Avec afin de nous lancer dans un vaste exercice de comptabilité criminalistique pour sérier les mouvements de fonds. Or, nous ne sommes que journalistes et, fort heureusement, pas officiers de police judiciaire ou agents du fisc.
Au vu du modus operandi de Bernard Bensaïd à la présidence du GHM, il nous est en revanche permis de poser la question de savoir si ces pratiques consistant à prélever des fonds de certaines entités pour en renflouer d’autres, alors que rien ne l’autorise, ne sont pas plus fréquentes.
Pour qu’un tel système tienne, il faut un management par la peur et une pression constante sur le personnel de direction et d’encadrement des entités afin qu’ils s’échinent à maintenir l’activité d’entreprises constamment au bord de la cessation de paiement du fait d’éventuelles ponctions de la “maison mère”, et répercutent à leur tour cette pression sur les petites mains, à qui toujours plus est demandé pour le même salaire de misère. Et, pour faire passer l’amère potion, on accorde aux cadres de menus avantages pas toujours réguliers. Cela présente également l’avantage de limiter les velléités de lancement d’alerte par peur du licenciement et d’économiser de l’argent sinon dû. C’est ce que nous verrons dans le deuxième volet de cette enquête sur l’association AAPPUI.